samedi 21 mai 2011

Pierre, dit Maurice, RESTOUEIX honoré par la Ville d’Allassac

Le vendredi 10 juin 2011, la Ville d’Allassac honorera la mémoire de Pierre, dit Maurice, Restoueix, rescapé du camp de Neuengamme. En ce jour de commémoration de la tragédie d’Oradour-sur-Glane, son nom sera officiellement donné au groupe scolaire de la cité ardoisière.
En 1994, Jean-Michel Valade avait recueilli son témoignage, diffusé, la même année, dans le film Les derniers témoins corréziens du camp de concentration de Neuengamme, récemment mis en ligne sur Corrèze Télévision http://correzetelevision.fr/ 
Plus tard, en 2002, Maurice Restoueix avait participé, avec d’autres, à l’ouvrage Au bout de l’enfer concentrationnaire : la vie. Paroles de rescapés corréziens des camps nazis.
Le 31 octobre 2005, au cimetière d’Allassac, Jean-Michel Valade eut l’honneur de prononcer son éloge funèbre. En voici quelques extraits.

« Pierre Restoueix, Maurice pour la plupart d’entre nous, s’en est allé, ce 29 octobre, 48 heures après le colonel Guingouin, son compatriote de la Haute-Vienne qu’il admirait. Pierre Restoueix est parti avec la discrétion qui l’a toujours caractérisé tout au long de sa vie.
Une vie cruellement marquée dans sa jeunesse par l’une des plus grandes tragédies qui ont jalonné le XXe siècle, ce siècle que Victor Hugo espérait pourtant “heureux”.
C’est au petit matin du 15 avril 1944 que le résistant de Libé-Nord est tombé, en ce jour funeste où la répression nazie, aidée en cela par les forces supplétives de la bande Bonny-Lafon, s’est abattue sur Le Saillant. Tout bascule, alors.
En quelques heures, c’est le départ pour la prison de Tulle et ses interrogatoires.
En quelques jours, c’est le transfert pour la prison de Limoges, à la bien sinistre réputation avec ses 2 863 résistants qui y seront exécutés.
En quelques semaines, c’est l’arrivée au camp d’internement de Royalieu, près de Compiègne.
Et puis, un dimanche de la fin mai, c’est le long voyage pour le camp de Neuengamme, dans les landes de Lunebourg, à l’est de Hambourg. Là, le matricule 32 033 fait alors connaissance avec l’enfer concentrationnaire nazi. Le froid… La faim… La vermine… Les mauvais traitements… L’humiliation au quotidien… Les journées de travail harassant au service de l’économie du Reich dans les usines Hermann Goering… Les maladies… La mort qui rôde en permanence mais qui, finalement, n’a pas voulu de lui…
Oui, à Neuengamme comme au kommando de Drütte, Pierre Restoueix a connu, durant onze longs mois de cendres et de plomb, cet univers où l’Homme était sans nom, où l’Homme était sans avenir, où l’Homme était sans sépulture. Cet univers qui a accompagné notre ami jusque dans sa dernière nuit.
Libéré par l’armée canadienne, le 12 avril 1945, il rejoint la Corrèze le 1er mai. En gare d’Allassac, il pesait 39 kilos, lui qui, un an auparavant, en faisait 84.
Et puis, comme la vie est toujours plus forte, l’ancien déporté va accomplir, soixante ans durant, d’abord dans la région parisienne, puis en Corrèze, un beau parcours d’homme digne et droit, estimé de tous et respecté de chacun.
Témoin en 1947 au procès de Hambourg, face à quelques-uns de ses bourreaux, qui furent condamnés, Pierre Restoueix aimait à rappeler que c’était à l’initiative de jeunes Allemands, dont Eva, son amie de Salzgitter, qu’en 1985 son ancien camp de Drütte était devenu un lieu de Mémoire. Ce fut pour lui l’occasion de pèlerinages outre-Rhin et de fructueux moments de partage.
En effet, cet homme-là n’avait pas la haine chevillée au corps. Lui, qui avait su rester debout en toutes circonstances, était l’incarnation même de la tolérance, de la générosité, de l’humanité. »